Gueckédou- Justice : « Mieux vaut libérer dix coupables que de condamner un innocent », dixit le Juge Oumar Diallo

février 12, 2021 Non Par Guineecontact.com

À Gueckédou, le Juge de Paix  Oumar Diallo  a ordonné la libération  provisoire de plusieurs  prévenus pour des fins d’enquêtes supplémentaires. D’après lui, mieux vaut libérer 10 coupables que de condamner un innocent.

C’est du moins la première décision du tribunal qui siège autour de la mort mystérieuse d’un petit garçon au champ dans un village de Gueckédou !

 

S’adressant à la partie civile, le Président du tribunal a déclaré : « Ce qui arrive dans votre village est à la fois terrible et confus. Toutefois, la vérité peut jaillir plus tard, parfois après des années, » avant d’ajouter « mieux vaut libérer dix coupables  que de  de condamner un seul  innocent ! »

 

D’après lui, quand le juge doute mieux vaut libérer! Réputé pour son professionnalisme depuis sa récente arrivée à la tête de la Justice de Paix de Gueckédou, Oumar Diallo est  surnommé Tamba Togna  (le Véridique) dans le pays Kissi.

 

  1. Diallo affirme que dans la présente situation, plusieurs méthodes sont à adopter. La première est de libérer tous les prévenus pour des fins d’enquêtes supplémentaires. La seconde est de les faire retourner en prison.

Le Juge Oumar a décidé d’ordonner la mise en liberté provisoire des mis en cause pour deux semaines. Et le 23 février prochain, la dizaine des accusés, qui plaident tous non coupables, devront se présenter au tribunal. Et l’engagement d’un garant par accusé est la condition sine qua non pour cette liberté conditionnelle.

 

La mort de Michel défraie  la chronique non seulement dans son village Bambolo, district de Tallo Bengou, sous-préfecture de Tékoulo mais aussi dans toute la préfecture de Gueckédou.

 

Selon les informations, l’acte s’est déroulé au cours d’une journée de moisson du riz aux environs de 12heures GMT, heure locale, près d’une heure après que les moissonneurs aient commencé la récolte. La tutrice avait fait coucher le mineur à « environ cinq mètres » de son lieu de travail et le petit garçon a été plus tard trouvé mort dans un fleuve situé à 25 mètres selon les investigateurs. D’où le caractère miraculeux dans cette affaire, estime le Président du tribunal !

 

Les mis en cause ont tour à tour nié les faits qui leur sont reprochés. Les présumés cerveaux du crime ont eux aussi rejeté l’accusation selon laquelle une fétiche, placée dans ce marigot, attirerait des esprits.

 

Pour Bipoh Kamano, présumé détenteur du gris-gris: « les fétiches ne profitent personne. » Le nom Bipoh signifie en Kissi ‘Tiens jusqu’à nouvel ordre’. Récidiviste, Bipoh rejette tous les faits mis à sa charge: « j’ai cité Woyah à cause de son âge », dit-il.

Le patriarche Woyah Kamano dit de son côté ne rien savoir des fétiches. Né après plusieurs avortements, Woyah signifie ‘Éphémère’ en Kissi. Ce nonagénaire est accusé être le détenteur du fétiche qui aurait attiré le défunt à la rivière.

« De telles circonstances font peur aux investisseurs locaux », martèle le Juge Oumar ! « Je n’en sais rien du tout, » réagit le vieux Woyah.

Après trois audiences, dit le Juge, je deviens très perplexe dans ce dossier. Immédiatement, Woyah Kamano renchérit: « Je suis prêt à aller en prison même pour une peine capitale », dit ce prévenu qui a presque perdu l’usage de ses membres inférieurs lors de sa précédente détention pour le  meurtre de Niouma dans les mêmes circonstances.

Subitement, l’audience a été suspendue pour cinq minutes. À la reprise, le Président invite à la barre tout le box des accusés. À leurs côtés, la partie civile. Faya Kamano, représentant de la famille victime déclare : « Mon cœur languit, mais je m’en remets à la sagesse de l’autorité judiciaire, » estime-t-il.

Au Juge de rappeler : « Je veux retourner les accusés en prison. Mes dernières enquêtes me laissent sans solutions. Des enquêtes policières de la première accusation, aucune trace tangible n’existe pour incriminer les récidivistes. La règle ‘les mêmes causes’ produisent les mêmes effets n’a tout aussi fonctionné » encore. La barre n’est pas en train de produire des effets escomptés, pense Oumar Diallo. Je risque alors de mettre des innocents en prison, avise-t-il; et je ne voudrais pas aussi utiliser la méthode archaïque d’usage de la violence pour avoir des aveux d’un quelconque prévenu. Là-dessus, le récidiviste Woyah dit avoir été torturé jusqu’à perdre l’usage de ses pieds lors de sa précédente arrestation. « J’ai reçu environ 100 coups sur chacun de mes membres inférieurs. Et  une partie de ma côte aussi…, » a-t-il fait savoir à la cour.

La question du charlatanisme, de la sorcellerie devant les tribunaux fait aujourd’hui débats à Gueckédou…

Nous y reviendrons !